Stocks et commandes en cours d'exécution

Regardons plus en détail les stocks et commandes en cours d'exécution

Stocks et commandes en cours d'exécution

1. Les stocks

1.1. Principes généraux

Dans l’optique générale de l’AR CSA, comme d’ailleurs dans la réalité économique des entreprises, les stocks se situent dans le cycle d’exploitation de l’entreprise, pour être :

·         soit consommés au premier usage ;

·         soit vendus en l’état ou au terme d’un processus de production en cours ou achevé.

C’est la raison pour laquelle :

·         au bilan, les stocks sont considérés comme relevant de la catégorie des actifs circulants ;

·         au compte de résultats, les achats de marchandises et d’approvisionnements, les ventes de marchandises et de produits finis, ainsi que les variations de stocks interviennent au titre de résultats d’exploitation ;

·         en matière d’évaluation, la valeur d’acquisition doit être confrontée à la valeur de marché ou à la valeur de réalisation.

Ne relèvent pas de la définition des stocks et ne peuvent être traités comme tels sous l’angle comptable, les biens qui ressortissent à d’autres rubriques du bilan, notamment :

·         à la rubrique « immobilisations », à savoir les éléments du patrimoine qui sont destinés à servir de façon durable l’activité de l’entreprise, en particulier à la rubrique « Immobilisations corporelles », tels que notamment :

·         les biens corporels destinés à être immobilisés ou pour lesquels une décision d’immobilisation a été prise ;

·         les pièces de rechange relatives aux installations et à l’outillage et destinées exclusivement au service de ces installations et de cet outillage ;

·         les emballages qui normalement peuvent être utilisés à plusieurs reprises (« matériel d’emballage ») ;

·         les catalyseurs ;

·         des valeurs de placement ou des placements de trésorerie ;

·         des comptes de régularisation ; ceux-ci sont destinés à rattacher aux exercices qu’ils concernent, par report d’un exercice antérieur ou par report à un exercice ultérieur, les produits perçus (ou à percevoir) et les charges exposées (ou à exposer) au cours d’un exercice déterminé (avis CNC 132/7).

Le compte 35 « Immeubles destinés à la vente » regroupe les immeubles destinés à la vente, à l’inclusion des terrains, des constructions et des droits réels sur biens immeubles. La CNC tient à souligner qu’il y a une différence essentielle entre les « Commandes en cours d’exécution » (compte 37) et les « Immeubles destinés à la vente » (compte 35). Sont portés sous la rubrique de « Commandes en cours d’exécution », les travaux en cours d’exécution, effectués pour compte de tiers en vertu d’une commande, mais non encore réceptionnés ainsi que les produits en cours de fabrication exécutés pour compte de tiers en vertu d’une commande, mais non encore livrés, sauf s’il s’agit de produits qui sont fabriqués en série de façon standardisée. Le compte « Immeubles destinés à la vente » reprend également les projets de construction qui ne sont pas effectués sur l’ordre d’un tiers mais réalisés par la société pour son propre compte.

La CNC est d’avis que le compte 35 « Immeubles destinés à la vente » comporte tant les immeubles destinés à la vente sans modifications ultérieures, que les immeubles qui font l’objet, avant d’être vendus, de certaines opérations, comme l’aménagement du terrain, la démolition d’une construction érigée sur un terrain, l’acquisition d’un terrain à bâtir en vue d’y ériger une construction, le lotissement d’un terrain acquis, etc. (avis CNC 2015/8).

Les maisons-témoins érigées par des entrepreneurs ou des promoteurs immobiliers sont également portés au compte 35 « Immeubles destinés à la vente ».

1.2. Moment de l’activation

Pour l’inscription des stocks à l’actif ainsi que pour l’enregistrement en comptabilité des entrées en stocks et des sorties de stocks, on se référera en règle générale, soit à la notion de « propriété », et au moment du transfert de propriété, soit à la notion de « risque » et au moment du transfert de l’essentiel des risques. Ce transfert intervient généralement au moment où les biens sont livrés à l’entreprise ou à son mandataire (transporteur ou entrepositaire), ou inversement, au moment où les biens cessent d’être sous le contrôle de l’entreprise ou de son mandataire. C’est dès lors à ce moment qu’en principe les entrées en stocks et les sorties de stocks sont comptabilisées. En pratique, les entrées en stocks et les sorties de stocks sont généralement intégrées dans la comptabilité générale d’une manière périodique.

Les biens confiés en consignation, en dépôt ou à vue relèvent du stock du propriétaire jusqu’à leur vente par l’intermédiaire ou le dépositaire. Il en est de même pour les biens confiés à façon : ceux-ci restent dans le stock du propriétaire.

Compte tenu de leur destination – affectation spécifique au règlement d’achats de stocks – les acomptes versés sur achats de stocks sont classés au bilan sous la rubrique « Stocks » et non sous la rubrique « Créances ». Il est évident, en effet, qu’il ne s’agit en principe pas d’une créance destinée à être récupérée. Elle s’éteindra par compensation avec la dette qui résultera de l’achat des biens destinés aux stocks (avis CNC 132/7).

1.3. Principes de valorisation

1.3.1. Matières premières et fournitures (matières premières, matières consommables et fournitures)

La valeur d’acquisition à l’entrée peut être définie comme un prix « rendu magasin » comprenant tout ce que le bien acheté a coûté jusqu’à sa première mise en stock par la société. Il s’obtient par l’addition des éléments suivants :

·         le prix d’achat en principal porté en facture par le ou les fournisseurs, compte tenu des rabais, remises et ristournes obtenus et du coût des emballages non repris ;

·         les droits et taxes qui grèvent le prix d’achat, tels que les droits d’accises, les droits d’entrée, la taxe sur la valeur ajoutée (dans la mesure où elle n’est pas récupérable) ;

·         les frais accessoires, imputables sans ambiguïté aux marchandises en cause, portés en compte par des tiers, fournisseurs de services, intervenant dans l’acheminement jusqu’à l’entreprise, des biens achetés, tels que :

·         les frais de port, de transport et d’assurance ;

·         les frais de chargement, de déchargement, de halage et éventuellement de stockage dans les ports ;

·         les frais de commissions et de courtage à l’achat ;

·         les frais internes exposés par l’entreprise pour acheminer, lors de l’achat, les biens achetés jusqu’au lieu de premier stockage, tels que les frais de déchargement et de manutention, de traction ferroviaire propre et de transport par camions propres.

L’inclusion dans le prix d’acquisition des stocks de marchandises des frais accessoires visés sub 3° et 4° ne s’impose pas si ces frais revêtent, en termes relatifs, une importance négligeable.

En revanche, le prix d’acquisition ne comprend les frais internes relatifs à la prospection du marché, à la passation des commandes aux fournisseurs, au contrôle des marchandises entrées, à leur transport après acquisition à l’intérieur de l’entreprise, à l’administration des stocks que dans la mesure où ces frais sont rattachés de manière spécifique aux stocks en cause.

Par ailleurs, il ne comprend les frais de conservation en magasin que dans la mesure où la conservation constitue un élément de valorisation de la marchandise en cause (p. ex. le vin) (avis CNC 132/7).

1.3.2. Marchandises

Voyez les règles décrites pour les matières premières et fournitures.

1.3.3. Produits finis (production pour le stock)

Le produit fini est valorisé à la valeur d’acquisition, c’est-à-dire au coût de revient.

Conformément à l’article 3:15 AR CSA, le coût de revient s’obtient en ajoutant au prix d’acquisition des matières premières, des matières consommables et des fournitures, les coûts de fabrication directement imputables au produit ou au groupe de produits considéré ainsi que la quote-part des coûts de production qui ne sont qu’indirectement imputables au produit ou au groupe de produits considéré, pour autant que ces coûts concernent la période normale de fabrication.

Le principe de base est donc celui du coût de revient intégral (full cost) comprenant tout ce qu’a coûté le produit fini jusqu’à sa mise en stock et qui s’obtient en additionnant les éléments suivants :

Les charges directes de production, c’est-à-dire les charges qui peuvent être affectées directement, sans calcul intermédiaire, au coût d’un produit ou d’un groupe de produits bien déterminé, telles que :

·         les approvisionnements (matières premières, fournitures) utilisés (y compris les emballages et accessoires qui font corps avec le produit fini), valorisés à leur prix d’acquisition selon une des méthodes d’imputation des sorties de magasin mentionnées ci-dessus ;

·         les services, travaux et études directement rattachés aux produits finis ;

·         les sous-traitances générales ;

·         les rémunérations de la main-d’œuvre directe de production et les charges sociales y relatives ;

·         les amortissements directement imputables ;

·         certaines charges qui, même si elles transitent par des centres de frais ou si elles sont imputées sur base d’une clé de répartition appropriée, peuvent être rattachées à ce coût sans ambiguïté.

Les charges indirectes de production, c’est-à-dire celles qui ne se produisent pas par produit ou par un groupe de produits, mais pour toutes les productions fournies pendant une période (location de bureaux, services, ateliers, magasins, contrôle de qualité…) et qui, après transferts éventuels entre centres, sont imputées au coût de revient sur la base d’une clé de répartition.

Tant les charges directes qu’indirectes contiennent des éléments « variables » et des éléments « fixes » (qui restent plus ou moins fixes entre deux seuils d’activité) constitués par les coûts industriels généraux, les coûts des services auxiliaires et les coûts des services de fabrication.

L’imputation aux stocks des charges fixes de production doit être opérée sur la base de « conditions normales d’exploitation » et, notamment, d’une utilisation normale de la capacité de production. Cette capacité normale correspond à la production attendue en moyenne dans des conditions normales, de l’outil de production au cours d’un certain nombre de périodes.

Si la production effective correspond approximativement à cette utilisation normale, elle peut être retenue comme base.

Si la production effective est restée en deçà de la capacité normale, l’excès de coût qui en résulte ne peut être rattaché aux produits stockés et doit rester à charge de la période considérée. Il importe, en effet, d’éviter d’inclure dans la valeur des stocks, et dès lors de reporter à une période ultérieure, des coûts effectivement supportés au cours de la période mais qui, en raison de conditions non récurrentes ou anormales dans lesquelles l’exploitation s’est exercée, ne peuvent, en économie d’entreprise, rationnellement être rattachés à la production stockée.

En revanche, le coût de revient ne comprend pas les éléments suivants :

·         les dépenses de recherche et de développement, les frais d’administration générale et les frais de commercialisation et de vente ;

·         les coûts afférents aux malfaçons, erreurs de production et autres pertes lorsque ces coûts ne relèvent pas des conditions normales d’exploitation ;

·         les intérêts débiteurs afférents aux emprunts contractés pour financer les stocks. Une faculté d’inclusion de ces charges financières dans le coût de revient des stocks est toutefois ouverte par l’article 3:16, alinéa 2, AR CSA, mais uniquement pour autant que ces charges concernent des stocks dont la durée de fabrication est supérieure à un an et qu’elles soient relatives à la période normale de fabrication de ces stocks.

Si l’article 3:15 AR CSA pose comme principe le « full costing », il prévoit toutefois, conformément à la directive 2013/34/UE, la faculté de ne pas inclure dans le coût de revient des fabrications tout ou partie des frais indirects de production, à la condition d’en faire mention dans l’annexe.

Cette faculté permet de ne pas tenir compte des éléments de coût de revient qui, au total, ne représenteraient qu’une signification négligeable.

Le libellé de cette disposition est toutefois fort large en ce qu’il autorise la non inclusion de l’ensemble des frais indirects de production et consacre la possibilité de n’inclure dans la valeur des produits finis que les seules charges directes de production (direct costing).

Dans la mesure où ces coûts indirects représenteraient une fraction non négligeable du coût total et où l’usage de cette faculté porterait sur l’ensemble ou sur une partie substantielle de ces coûts indirects, il en résulterait une sous-évaluation systématique de la valeur d’acquisition des stocks de produits finis ainsi que des résultats actés. Une telle sous-évaluation paraît difficilement justifiable au regard de l’exigence de l’image fidèle, même si une mention adéquate est insérée dans l’annexe.

La CNC (avis 132/7) estime dès lors devoir recommander de ne pas faire usage de cette faculté dans la mesure où son usage conduirait à une telle sous-évaluation.

Il convient par ailleurs de souligner que les normes IAS/IFRS (IAS 2, n° 12) n’autorisent pas la méthode de « direct costing ».

Coût de revient standard

Pour l’évaluation de ses produits finis et de ses en-cours de fabrication, une entreprise peut adopter un système de coûts standards ou une autre forme de coût de revient précalculé, pour autant que ce coût précalculé corresponde suffisamment au coût de revient effectif normal pour porter le bien en cause en son état d’achèvement actuel à l’endroit où il se trouve.

Ceci implique :

·         que l’entreprise dispose d’une comptabilité analytique des coûts permettant de justifier les divers éléments du coût standard, de dégager les coûts prévisionnels et les coûts réels et d’analyser les écarts ;

·         que les coûts standards soient significatifs pour la situation actuelle ;

·         et qu’en cas d’écart important entre le coût de revient standard et le coût de revient déterminé conformément aux principes décrits ci-avant, cet écart doit, sauf s’il résulte de circonstances anormales (gaspillages, sous-utilisation des installations, etc.) entraîner une rectification de la valeur des stocks.

Produits joints

Par « produits joints », il y a lieu d’entendre la situation dans laquelle un processus de production unique débouche simultanément sur la production de plusieurs produits ou sous-produits, dont le coût de revient respectif ne peut dès lors être identifié séparément (ex. : le raffinage de produits pétroliers).

Dans le cas de produits joints, le coût de revient de chacun d’eux doit, par conséquent, être estimé par une méthode forfaitaire. Cette méthode devra toutefois être rationnelle et être appliquée de manière constante et systématique, sans préjudice toutefois des adaptations qui seraient rendues nécessaires par une modification significative des conditions spécifiques dans lesquelles évoluent les produits joints.

Une méthode utilisée fréquemment dans la pratique consiste à répartir le coût de revient total entre les produits joints, en proportion de la valeur de marché ou de réalisation de ces différents produits au moment où, dans le processus de fabrication, ils deviennent identifiables séparément ou, à défaut, à la fin du processus de fabrication.

1.3.4. En-cours de fabrication (production pour le stock)

Voyez les règles décrites pour les produits finis.

1.4. Stocks dont le prix d’acquisition est exprimé dans une devise étrangère

Pour les actifs (et passifs) non-monétaires dont l’acquisition a donné lieu à une opération en devise (par exemple les stocks, les immeubles ou les participations dont le prix d’acquisition est libellé en devise), la valeur d’acquisition pour laquelle ils sont et restent inscrits dans les comptes est leur valeur d’acquisition en euro, à savoir, le montant résultant de l’application du cours de conversion, au montant du prix stipulé en devise. Le cours de conversion est, en principe, le cours « vendeur » au comptant pour les opérations donnant lieu à une dette en devises, sauf s’il y a une opération spécifique de couverture.

La valeur d’acquisition de ces actifs n’est pas – en principe – influencée par l’évolution ultérieure du cours de change de la monnaie en laquelle la dette d’achat est stipulée ni par le cours effectif auquel, à l’échéance, la dette est apurée. Il y a lieu de considérer en effet que l’évolution de la valeur de la monnaie en laquelle la dette d’achat est stipulée, postérieurement à l’enregistrement de l’opération est et reste étrangère à la détermination de la valeur d’acquisition de ces actifs non-monétaires.

C’est aussi par rapport à cette valeur d’acquisition en euros, qu’en ce qui concerne les stocks, s’applique, le cas échéant, la règle de l’évaluation à la valeur inférieure du marché ou que, éventuellement, s’impose la constitution ou la reprise de réductions de valeur en deçà de cette dernière (avis CNC 152/1).

1.5. Valeur de marché

1.5.1. Matières premières et fournitures (matières premières, matières consommables et fournitures)

Les approvisionnements ont été acquis et stockés en vue de la fabrication de produits finis ou en vue de l’exécution de commandes reçues, dès lors que l’entreprise est en risque sur ses coûts de production ultérieurs. La valeur de marché à prendre en considération est dès lors, en principe, le prix de marché à l’achat, c’est-à-dire celui qui résulterait du prix d’achat principal qu’on obtiendrait dans des conditions normales et habituelles d’achat (compte tenu des rabais usuels), augmenté d’une évaluation des frais accessoires d’achat qui seraient normalement incorporés au prix d’acquisition.

Dans la mesure toutefois où des indices sérieux permettent de croire que le prix de vente des produits finis ne sera pas affecté sensiblement par la baisse du prix à l’achat des approvisionnements, il est loisible à la société de considérer comme prix de marché, non pas le prix à l’achat mais la quote-part du prix de vente, départ usine des produits finis, afférents aux approvisionnements sous déduction d’une décote correspondant aux frais de vente. La mise en œuvre de cette méthode requiert toutefois une grande prudence.

1.5.2. Marchandises

Les marchandises étant destinées à être vendues, le prix de marché à prendre en considération est, en principe, le prix de vente « départ entreprise », à la clôture de l’exercice, qu’on obtiendrait dans des conditions habituelles et normales de vente, compte tenu des remises, rabais et ristournes habituellement accordés par l’entreprise, sous déduction d’une décote correspondant aux frais directs normaux de vente (que le prix de marché doit normalement couvrir et qui ne sont pas compris dans le prix d’acquisition).

Au cas où l’entreprise ne disposerait pas de mercuriales fiables pour la détermination du prix du marché de fin d’exercice, celui-ci pourra être déterminé par référence aux ventes réalisées par l’entreprise durant une période proche de la date de clôture, pour autant que ces ventes aient porté sur des quantités de marchandises importantes, variées et suffisamment représentatives des différentes catégories de produits en stock à la clôture de l’exercice.

1.5.3. Produits finis (production pour le stock)

Le prix de marché est le prix de marché à la vente, « départ entreprise », qu’on obtiendrait dans des conditions habituelles et normales de vente, compte tenu des remises, rabais et ristournes habituellement accordés par l’entreprise, sous déduction d’une décote correspondant aux frais directs normaux de vente.

1.5.4. En-cours de fabrication (production pour le stock)

Le prix de marché à prendre en considération est le prix de vente net des produits finis achevés (cfr. 1.5.3. ci-dessus), déduction faite du montant estimé des coûts y afférents qui doivent encore être exposés pour leur achèvement (art. 3:48, 1er al., AR CSA). Par prix de vente net, on entend le prix du marché déduction faite des frais de vente et de commercialisation.

Les coûts restant à exposer pour l’achèvement des produits dont il y a lieu de tenir compte sont les coûts totaux de fabrication, c’est-à-dire non seulement les coûts directs mais aussi l’intégralité des coûts indirects, afférents au produit en cours de fabrication. L’article 3:15 AR CSA ne peut dès lors être appliqué a contrario.

Une distinction doit-elle être faite selon que l’écart négatif entre le prix de marché final et le coût de revient final concerne la production déjà effectuée ou la production restant à effectuer ?

Sur la base des principes généraux et de l’optique de base de l’AR CSA il conviendrait d’acter une réduction de valeur sur la perte afférente à l’encours et de former une provision pour couvrir la perte estimée sur les travaux restant à exécuter. Le libellé de l’article 3:48, alinéa 1er, permet toutefois de rencontrer l’écart négatif par la constitution d’une réduction de valeur, sans distinguer entre la partie afférente à la fabrication déjà réalisée et la partie restant à réaliser.

1.5.5. Traitement comptable

La valorisation à la valeur de marché est une méthode de valorisation (art. 3:47 AR CSA) et n’est pas une forme de réduction de valeur visée à l’article 3:48 AR CSA. Par conséquent, la valorisation à la valeur du marché est actée via les variations de stock.

1.6. Valorisation forfaitaire

L’article 3:20 AR CSA comporte une dérogation au principe de la valorisation individuelle :

« Par dérogation aux articles 3:9, 3:13, 3:25, 3:30, 3:34, 3:46, 3:47, 3:48, 3:49, 3:50 et 3:52, le petit outillage, ainsi que les approvisionnements, qui sont constamment renouvelés et dont la valeur d’acquisition est négligeable par rapport à l’ensemble du bilan, peuvent être portés à l’actif pour une valeur fixe si leur quantité, leur valeur et leur composition ne varient pas sensiblement d’un exercice à l’autre. Dans ce cas, le prix du renouvellement de ces éléments est porté sous les charges d’exploitation. »

1.7. Valorisation des stocks sur base du prix de vente

L’AR CSA pose le principe que les stocks sont évalués à leur valeur d’acquisition.

Dans les entreprises de négoce, principalement celles qui vendent un grand nombre d’articles diversifiés, la détermination précise et détaillée, selon cette approche additive, de la valeur d’acquisition des stocks en rayons et le suivi de ces stocks sur cette base sont souvent malaisés. Aussi, est-il fréquent que dans les comptes annuels, la valeur d’acquisition de ces stocks soit déterminée par une approche soustractive consistant à appliquer au prix de vente au détail de ces stocks, la marge à concurrence de laquelle le prix d’acquisition a été majoré pour fixer le prix de vente.

De l’avis de la CNC, une telle méthode, inspirée des « Retail inventory method » et « gross profit method » anglo-saxonnes, est valable et admissible à condition qu’elle aboutisse en fait à reconstituer avec un degré suffisant d’approximation, la valeur d’acquisition des stocks en cause.

Il s’ensuit que la réduction appliquée au prix de vente ne peut être fixée de manière forfaitaire, a fortiori de manière arbitraire. Elle doit résulter d’un calcul afférent à la période couverte par le cycle normal de commercialisation des biens en cause actuellement en stock. Elle doit dès lors être réexaminée périodiquement en fonction de la relation effective entre le chiffre d’affaires réalisé et les coûts engagés au cours de la période pour l’acquisition des marchandises vendues ou restant en stock. Elle doit être chiffrée par catégories d’article homogènes, sous l’angle de la marge de commercialisation. Le montant auquel l’application de cette marge conduit ne peut englober des charges qui ne constituent pas un élément du prix d’acquisition des stocks en cause. La méthode doit être appliquée avec une rigueur telle qu’elle conduise à reconstituer, de manière statistiquement valable, le prix d’acquisition des diverses catégories de marchandises concernées.

S’agissant de déterminer la valeur d’acquisition au départ du prix de vente, la méthode n’est susceptible d’être utilisée que pour les marchandises situées dans les lieux de vente. Elle n’est pas susceptible d’être appliquée aux stocks centraux ; ce n’est en effet qu’au moment où ils se trouvent exposés ou offerts en vente, à un prix de vente déterminé, que la méthode est susceptible d’être mise en œuvre. Les stocks centraux seront dès lors gérés en prix d’acquisition déterminé de manière directe.

Le Comité de contact institué par la quatrième directive pour l’application harmonisée des dispositions de celle-ci a de son côté constaté la compatibilité de cette méthode avec la quatrième directive (avis CNC 126/7). La quatrième directive a entre-temps été remplacée par la directive 2013/34/UE.

1.8. Évaluation des stocks : achat groupé et revente à la pièce

L’avis CNC 2016/5 examine comment procéder à la valorisation du stock d’une entreprise qui procède à la vente à la pièce d’éléments acquis en vrac.

L’avis analyse la validité du recours à une « approche soustractive », commentée dans l’avis 126/7, pour déterminer la valeur d’acquisition d’un stock consistant à appliquer au prix de vente au détail de ces stocks, la marge à concurrence de laquelle le prix d’acquisition a été majoré pour fixer le prix de vente.

En pratique des marges très différentes peuvent être réalisées selon les pièces vendues.

Pour cette raison, l’établissement de catégories homogènes de marchandises mises en vente devra faire l’objet d’une attention particulière en vue d’appliquer, aux différents éléments de chaque catégorie, une marge appropriée en déduction du prix de vente.

1.9. Prise en compte d’intérêts débiteurs

L’article 3:16 AR CSA prévoit que le coût de revient des stocks ne peut inclure les charges d’intérêt afférentes aux capitaux empruntés pour les financer, que pour autant que ces charges concernent des stocks dont la durée de fabrication est supérieure à un an et qu’elles soient relatives à la période normale de fabrication de ces stocks.

L’inclusion des intérêts sur capitaux empruntés dans la valeur d’acquisition est mentionnée parmi les règles d’évaluation à l’annexe.

Seules certaines entreprises entrent en ligne de compte pour l’application de cette règle et elles appartiennent en majeure partie au secteur de la construction.

1.10. Réductions de valeur

L’article 3:48 AR CSA distingue, en, fonction de l’origine, deux sortes de réductions de valeur :

·         les en-cours de fabrication font l’objet de réductions de valeur si leur coût de revient, majoré du montant estimé des coûts y afférents qui doivent encore être exposés, dépasse leur prix de vente net à la date de clôture de l’exercice ;

·         des réductions de valeur complémentaires sont actées sur les matières premières, les fournitures, les produits finis et les marchandises, les immeubles destinés à la vente et les encours de fabrication pour tenir compte soit de l’évolution de leur valeur de réalisation ou de marché, soit des aléas justifiés par la nature des avoirs en cause ou de l’activité exercée.

Peu importe la raison sous-jacente, les réductions de valeur sont toujours actées dans le compte 631.

2. Commandes en cours d’exécution

2.1. Notion et comptabilisation

On entend par commandes en cours d’exécution toute prestation de services ou production de biens réalisée par une entreprise, en dehors de sa production en série éventuelle, suivant les instructions spécifiques d’un client. Contrairement aux stocks, sont qualifiés de commandes en cours d’exécution, les services, prestations et biens dont quasiment toutes les caractéristiques sont déterminées par l’acquéreur et qui ne font pas partie de la gamme courante de produits réalisés par l’entreprise et dont les aspects commerciaux ont déjà été négociés au moment de la production. De ce fait, les commandes en cours d’exécution, à l’exception de contrats « cost plus », sont exposées à ce qu’on appelle un risque de coût de revient, alors que le risque auquel sont exposés les en-cours de fabrication, est plutôt de nature commerciale (avis CNC 2012/15).

De la définition figurant à l’article 3:89, § 1er, AR CSA, il ressort que les commandes en cours d’exécution ont trait à des biens et services non encore livrés :

« Sont portés sous la rubrique « commandes en cours d’exécution » :

a)       les travaux en cours d’exécution, effectués pour compte de tiers en vertu d’une commande, mais non encore réceptionnés ;

b)      les produits en cours de fabrication exécutés pour compte de tiers en vertu d’une commande, mais non encore livrés, sauf s’il s’agit de produits qui sont fabriqués en série de façon standardisée ;

c)       les services en cours de prestation, exécutés pour compte de tiers en vertu d’une commande, mais non encore livrés, sauf s’il s’agit de services qui sont prestés en série de façon standardisée. »

Les commandes en cours d’exécution ne se retrouvent pas uniquement dans les entreprises de production, mais également dans le secteur des services.

Tant que la livraison n’a pas eu lieu,

·         les charges seront comptabilisées, selon leur nature, en compte de résultats ;

·         le coût de revient reste comptabilisé en classe 3 ;

·         les factures qui sont éventuellement envoyées aux clients, sont comptabilisées sous le compte 46 « acomptes sur commandes ».

Lors de la livraison, le compte de bilan « commandes en cours d’exécution » est crédité et les montants repris en « acomptes sur commandes en cours d’exécution » sont transférés en chiffre d’affaires.

Dans le secteur de la construction, la livraison a lieu lors de la « réception provisoire » par le maître de l’ouvrage.

2.2. Principes d’évaluation

L’article 3:49, premier alinéa, AR CSA dispose que :

« Les commandes en cours d’exécution sont évaluées à leur coût de revient majoré, compte tenu du degré d’avancement des travaux des fabrications ou des prestations, de l’excédent du prix stipulé au contrat par rapport au coût de revient lorsque cet excédent est devenu raisonnablement certain ; une société, ASBL, AISBL ou fondation peut toutefois adopter pour règle de maintenir les commandes en cours d’exécution ou certaines catégories d’entre elles au bilan à leur coût de revient. »

L’incorporation de la marge au coût de revient peut donc avoir lieu à deux moments différents :

·         soit en fonction de l’état d’avancement de la commande (percentage of completion method) ;

·         soit à la livraison de la commande (completed contract method).

Le texte donne l’impression que les deux méthodes sont équivalentes ; rien n’est moins vrai. Sous l’IAS 11, l’emploi de la « percentage of completion method » est obligatoire pour autant qu’il soit satisfait à certaines conditions. Tenant compte de l’influence sans cesse grandissante des normes internationales sur les règles européennes et donc sur les règles belges, toute société qui opte pour la « completed contract method », doit être consciente que ce choix sera probablement de nature temporaire.

Une société peut aussi opter pour l’utilisation des deux méthodes, mais alors pour des contrats de nature différente (soit selon le type de travaux, soit selon la localisation du chantier, etc.). Le choix entre les deux méthodes doit être mentionné dans les règles d’évaluation. Le choix doit évidemment être appliqué de façon constante.

Dans l’avis 2012/15, la CNC fournit, sous la forme d’un tableau, les principales différences entre les deux méthodes.

 

Méthode du pourcentage d’avancement des travaux

Méthode de l’achèvement des travaux

Certitude du résultat reconnu

L’anticipation des bénéfices dans les exercices précédant la réception se fait sur base d’estimations.

D’où la naissance d’un risque de comptabiliser prématurément des bénéfices sur des produits bruts, qui plus tard pourront s’avérer fictifs.

Le résultat est certain et correct, étant donné que l’état final est pris en considération.

Il n’est pas nécessaire de faire des estimations importantes.

Évolution du résultat

Flux continu de bénéfices.

Flux discontinu de bénéfices, en fonction, du moment de la réalisation.

Comptes annuels

Reflet de la réalité économique de l’entreprise.

Les bénéfices sont générés dans la période de la fabrication effective et de l’exposition des frais.

Génération de réserves occultes qui ne sont traduites dans la comptabilité qu’à la fin de la commande (lors de la réalisation).

Principe comptable de base

Prédominance du principe de rattachement.

Prédominance des principes de prudence et de réalisation.

 

2.3. Comptabilisation alternative : présentation en net

Toutes les entreprises peuvent compenser les rubriques du bilan « Commandes en cours d’exécution » et « Acomptes sur commandes ».

Le deuxième alinéa de l’article 3:49 prévoit :

« Les commandes en cours d’exécution peuvent faire l’objet d’une compensation directe avec les acomptes reçus par contrat, au terme de laquelle soit le solde débiteur est présenté comme commande en cours d’exécution, soit le solde créditeur est présenté comme acompte reçu. Au début de chaque exercice, le solde est extourné. Au cas où cette faculté de compensation est utilisée, l’annexe mentionnera les montants avant l’établissement du solde. »

La CNC observe que la compensation admise concerne uniquement la présentation au bilan des postes « Commandes en cours d’exécution » et « Acomptes sur commandes ». Après l’établissement de l’inventaire final, les commandes en cours d’exécution et les acomptes reçus sur ces commandes sont apurés directement (en les soldant directement, sans passer par le compte de résultats) pour chaque projet, et ce quelle que soit la méthode d’imputation des bénéfices utilisée (notamment la méthode de completed contract ou la méthode de percentage of completion).

La CNC tient à souligner que la compensation devra être appliquée par projet et ne peut être appliquée de manière globale en vue de compenser les montants totaux du poste de l’actif du bilan « Commandes en cours d’exécution » et du poste du passif du bilan « Acomptes sur commandes ».

La compensation admise en vertu de l’article 3:4, alinéa 2, AR CSA doit être appliquée à tous les projets ou ne s’appliquer à aucun d’entre eux (avis CNC 2016/14).

Il faut remarquer que d’après la norme IAS 11, la présentation en net est la seule bonne méthode.

2.4. Prise en compte des intérêts débiteurs

L’article 3:16 AR CSA dispose que le coût de revient des commandes en cours d’exécution ne peut inclure les charges d’intérêt afférentes aux capitaux empruntés pour les financer, que pour autant que ces charges concernent des commandes dont la durée d’exécution est supérieure à un an et qu’elles soient relatives à la période normale d’exécution de ces commandes.

La prise en compte de charges d’intérêts sur capitaux empruntés dans la valeur d’acquisition des commandes en cours d’exécution est mentionnée parmi les règles d’évaluation à l’annexe.

2.5. Prise en compte d’intérêts créditeurs

Lorsqu’une société reçoit des acomptes sur commandes et qu’elle les place de manière provisoire, se pose la question de savoir si les intérêts créditeurs afférents à ce placement provisoire peuvent être imputés au coût de revient des commandes concernées (avis CNC 2012/15).

La CNC (avis 126/3) est d’avis qu’en principe une imputation directe n’est pas admissible, entre autres pour les raisons suivantes :

a)       la définition du coût de revient contenue dans l’AR CSA comprend exclusivement des charges qui ont un effet d’augmentation du coût ;

b)      dans la comptabilité et les comptes annuels, les composantes du coût de revient sont traitées d’abord, suivant leur nature, pour ensuite être transférées aux stocks et aux commandes en cours par la rubrique « Variation des en-cours de fabrication et des produits finis et des commandes en cours d’exécution » sans imputation directe à la commande concernée.

La CNC est cependant d’avis que, dans la mesure où, pour déterminer le prix de son offre, la société a tenu compte du produit du placement à titre provisoire des acomptes convenus, elle est en droit de considérer que ces intérêts constituent une partie intégrante du coût de revient de la commande concernée. Dans ce cas, ces intérêts ne peuvent être actés sans plus comme un produit, sans relation aucune avec le résultat sur la commande ni avec le moment où ce résultat doit être considéré comme réalisé. En effet, la comptabilisation de ces intérêts comme produit financier représenterait une prise anticipée de bénéfice au regard du résultat sur la commande, quelle que soit par ailleurs la méthode utilisée par la société pour la prise en compte de bénéfice sur des commandes en cours d’exécution (prise en compte échelonnée du bénéfice ou report du bénéfice jusqu’à l’achèvement des travaux).

En l’occurrence, la société peut à bon droit décider, en application de l’article 3:7 AR CSA aux termes duquel, dans le cas exceptionnel où l’application des règles d’évaluation prévues par l’arrêté ne conduirait pas au respect du principe de l’image fidèle, de tenir compte des intérêts créditeurs actés au compte de résultats (compte 75) pour la détermination de la valeur des stocks ou des commandes en cours d’exécution. Cette opération se fera par le transfert d’une somme d’un même montant à charge du compte de résultats, par le compte « Variation des commandes en cours d’exécution » (compte 717).

La restriction de l’article 3:7 aux « cas exceptionnels » implique qu’il ne peut être fait usage de cette faculté que moyennant certaines conditions à remplir, comme l’importance de la commande et la durée d’exécution ; de même l’intérêt créditeur doit découler du placement des acomptes obtenus et doit donc être directement imputable à la commande concernée.

En application de l’article 3:7 précité, alinéas 2 et 3, l’utilisation de cette possibilité doit être mentionnée et justifiée dans l’annexe, avec indication de son influence sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de la société, de l’ASBL, de l’AISBL ou de la fondation.

Cet avis vaut tant pour le cas où la société évalue les travaux ou les commandes en cours sur la base de l’état d’avancement des commandes (percentage of completion method) que pour le cas où elle les évalue à leur coût de revient.

2.6. Réductions de valeur

« Les commandes en cours d’exécution font l’objet de réductions de valeur si leur coût de revient, majoré du montant estimé des coûts y afférents qui doivent encore être exposés, dépasse le prix prévu au contrat.

Des réductions de valeur complémentaires sont actées sur les commandes en cours d’exécution pour tenir compte soit de l’évolution de leur valeur de réalisation ou de marché, soit des aléas justifiés par la nature des avoirs en cause ou de l’activité exercée » (art. 3:50 AR CSA).

Ces réductions de valeur peuvent être dues à des hausses inattendues des coûts salariaux, des matières premières ou d’autres éléments compris dans le calcul du prix final. Il est toutefois également possible que les réductions de valeur doivent être comptabilisées en raison d’un évènement inattendu comme des retards dans les travaux ou des dégâts nécessitant la réfection des travaux et ceci lors de l’application tant de la méthode du pourcentage d’avancement des travaux que la méthode de l’achèvement des travaux (avis CNC 2012/15).

2.7. Provisions

« Les risques et charges afférents à la poursuite de l’exécution de ces commandes font l’objet de provisions, conformément aux articles 3:11, 3:29, 3:31, 3:32 et 3:33, dans la mesure où ces risques ne sont pas couverts par des réductions de valeur actées en exécution de l’article 3:50 » (art. 3:49 AR CSA).

2.8. Annexe

À l’annexe, parmi les règles d’évaluation, il est fait mention :

·         de l’inclusion des charges d’intérêt dans la valeur d’acquisition de stocks ou de commandes en cours d’exécution (art. 3:16 AR CSA) ;

·         des méthodes et critères adoptés pour l’évaluation des commandes en cours d’exécution (art. 3:49 AR CSA) ;

·         de l’application de la compensation entre les « Commandes en cours d’exécution » et les « Acomptes sur commandes » (art. 3:49 AR CSA et avis CNC 2016/14).